VERSION AUDIO
(mentions: suicide, nourriture, réseaux sociaux)
Contexte:
Je (Lee) me sentais bien seul avec ma souffrance en 2016:
– En foyer de post-cure où je n’allais ainsi dire que pour dormir, manger et faire mon pillulier
– A la bibliothèque pour bosser sur mes cours et dossiers relatifs à la formation d’éducateur spécialisé
– Dans cette formation où je me retrouvais dans une nouvelle promo sans y avoir de personnes réellent proches, exceptés quelques formateurices
– Au sein d’un groupe d’ami.es constitué de personnes brillantes, dans lequel je me sentais comme un boulet, que j’essayais, avec une grande maladresse, de ménager autant que possible
– Sans psychologue
Les seules personnes que j’osais solliciter et avec qui je parlais de sans vraiment de filtre ma souffrance étant:
– Ma chouette psychiatre de l’époque
– Les écoutant.e.s de numéros d’appels anonymes
– Les membres d’un groupe de soutien entre personnes vivant avec un trouble de la personnalité borderline administré par un psychiatre sur un réseau social
Il est question dans le texte ci-dessous de ce dernier, écrit par une membre du groupe qui eut des réponses écrites et des actions très justes, face à mes propos de l’époque, pour le moins alarmistes.
J’ai rencontré Lee au début de l’année 2016. A l’époque, mon psychiatre avait crée un groupe de conversation Telegram rassemblant certains de ses patients. J’avais l’habitude de beaucoup plaisanter avec lui, au point que mon psychiatre nous conseilla, en plaisantant, d’écrire un sketch à jouer à l’hôpital. Tout cela se passant par internet, je n’avais aucune idée de ce à quoi Lee ressemblait.
Un soir que je travaillais tard sur mes cours avec le Telegram connecté, je reçois un message de la part de Lee. Il était 3h du matin.
« Adieu à tous. Merci pour tout ce que vous avez fait pour moi mais là j’en peux plus. Je m’en vais pour toujours. Adieu »
L’esprit un peu embrumé par les maths, je dois l’admettre, je me dis cependant qu’elles passeront après cet homme qui visiblement avait besoin d’aide.
« -Bon, écoute, là je vais pas te laisser tout seul, t’as besoin d’aide, je viens te chercher en voiture. C’est quoi ton adresse?
-Nan tu vas envoyer les pompiers je veux pas voir les pompiers!
-Parole de scout (et j’ai été scout), je viens te chercher. J’ai des bonbons à la maison, on regardera des conneries sur Youtube, tu peux dormir chez moi et on verra comment tu vas demain »
A force d’insister je finis par obtenir son adresse et partir là-bas. Je me retrouvai alors devant un homme que je n’avais jamais vu, l’air un peu triste, une peluche de cachalot, un peu défraîchi d’ailleurs, dans les bras. Nous nous regardâmes, silencieux, ne sachant trop comment entamer la conversation alors que nous nous étions parlé des dizaines de fois sur le chat. C’était un peu étrange, de se voir en vrai, lui serrant sa peluche, moi à côté de ma vieille guimbarde, ne sachant que dire. Il faisait froid et nous nous faisions face, nous connaissant sans s’être jamais rencontré.
« -Salut. Zénon.
-Salut. Lee.
-Bon, on rentre? Il fait froid. »
Nous mangeâmes des bonbons, regardâmes des vieux épisodes de Burger Quiz en inventant des « sel ou poivre » de mauvais goût, comparâmes nos peluches respectives, parlâmes médicaments, maladies, entourages, refîmes le monde pour, finalement, nous endormir tranquillement.
Ce fut ma première rencontre avec Lee. Nous sommes toujours en contact à ce jour. J’espère lui avoir apporté l’aide nécessaire, l’aide qu’il voulait et dont il avait besoin ce soir là.
Le lendemain, je (Lee) retournais en formation, à un partiel sur… « le normal et le pathologique ». Absurdité de la situation à son apogée.
par Zénon
Texte initialement posté le 23 février 2019 sur son blog
(ajouts en tout petit par Lee ANTOINE)
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