Mon anniversaire de médiatrice de santé pair [Sabrina PALUMBO-GASSNER]

Je passais récemment mon entretien annuel avec mon employeur. Même si cela peut faire sourire j’étais un peu stressée, sans motif valable mais on n’est jamais sûr de rien.

Cela s’est bien passé. Pour parler vrai j’ai été touchée des remarques positives et de la bienveillance de mon employeur à mon égard.

Comme j’ai dit, j’aimerais que cela se passe bien, ça se passe bien et je souhaite que cela continue. Je crois qu’on n’arrive pas au Un Chez-Soi par hasard… 🤫

L’occasion de faire le bilan de cette première année en tant que médiatrice de santé pair/pair-aidante.

Il s’est passé beaucoup de choses. A commencer par les grèves, la grossesse, le confinement/déconfinement, la reprise sur le terrain, l’émergence de projets inclusifs, des actions en lien avec la santé mentale. J’ai même co-créé une web appli de soutien à la parentalité « Koala » !

Cela n’a pas été une année de tout repos. C’est parfois difficile de ne pas « s’épuiser » mais je progresse dans le savoir dire « non ». Il faut garder en tête qu’on ne peut pas tout faire et répondre positivement à toutes les sollicitations.

Pour revenir au Un Chez-Soi, je suis contente de mon intégration. Les rencontres se font en binôme au domicile des locataires ou dans des cafés. J’ai envie de dire les rencontres avec les locataires mais aussi les rencontres entre collègues. On apprend à se connaître au fur et à mesure des temps collectifs et des visites à domiciles (VAD). C’est fluide. La complémentarité est là.

J’ai découvert que l’on pouvait prendre du plaisir en travaillant (sic). Malgré la maladie j’ai toujours eu à cœur de travailler et d’être « la plus normale possible » même s’il m’arrivait de vomir entre midi et deux en entreprise pour appeler un chat un chat. C’est peut-être ce qui m’a sauvé du statut de malade à vie. Je voulais être « comme tout le monde » sans nier mes difficultés pour autant. Et surtout pas brandir ma souffrance en étendard chaque fois que la vie me joue un mauvais tour.

Quoi qu’il en soit les jobs auxquels j’avais accès malgré tous mes diplômes ne faisaient pas sens et je n’étais pas épanouie au boulot. J’ai connu le burn out, le bore out, je ne saurais dire lequel est le pire… J’ai ce besoin fou de mettre du sens dans tout ce que je fais.

Je m’y retrouve avec la pair-aidance ! Mon métier me permet de concilier l’envie d’aider et le fait d’utiliser positivement mon vécu douloureux. Donner un sens à 15 ans de maladie et de dysfonctionnements dans mon environnement n’est pas rien.

Tous les « troublés » expriment le besoin de se sentir utiles. Lorsque j’étais en dépression je désespérais de n’avoir rien à faire, rien à dire et même si je pesais peu en raison de mon anorexie je croyais être un poids pour tous.

C’est dans l’associatif que j’ai le plus (re)trouvé le sentiment d’utilité même si mon emploi au sein d’un comité d’entreprise m’avait déjà remis le pied à l’étrier juste avant de donner vie à ces projets de longue date : créer une association, écrire un livre.

 
Avec le coaching j’ai commencé à me sentir plus en phase avec celle que je suis réellement mais ce n’est encore qu’une petite activité (qui permet tout de même de payer ma supervision 😉

Au Un Chez-Soi, outre le sentiment d’utilité, je peux être pleinement moi-même. C’est même ce que l’on attend de moi. Je peux laisser s’exprimer toutes les facettes de ma personnalité pour ne pas dire les “étiquettes” qui me composent. Je suis l’une d’elle. J’en suis aucune. Je suis l’ensemble…

Je n’ai pas besoin de jouer un rôle, porter un masque, me « cacher » derrière ma fonction. Il se passe des choses intéressantes grâce au partage du vécu et les personnes accompagnées ne sont pas dupes : la souffrance rapproche.

Ce travail a beaucoup de sens. Je me sens en accord avec les valeurs, la philosophie du dispositif et je n’ai plus de conflits de valeurs en partant travailler. Ceux-ci peuvent être de la torture quand on n’aime pas son job.

Les journées ne se ressemblent pas. Ce que je préfère ce sont les rencontres à domiciles (RAD) et à l’extérieur (RAE) mais aussi mener des projets en faveur de l’inclusion et de l’empowerment. Favoriser l’accès au numérique pour tous par exemple. J’ai aussi l’envie de développer une activité autour du sport. Le sport, comme l’art, c’est du rétablissement.

Bien sûr tout n’est pas parfait et il y a à faire pour remettre de la participation des usagers et la reprise de leur pouvoir. Il faut aussi -surtout – que les locataires s’en saisissent

Mes pairs me donnent parfois des “claques”, des leçons d’humanité. Il m’arrive de me sentir “con”. C’est très bien d’être c***, cela évite de se prendre pour dieu… Aux personnes à l’ego démesuré je prescrirai bien du travail de terrain.

Il est question d’une enquête de satisfaction mais en attendant je crois que bon nombre des locataires sont satisfaits de l’accompagnement. Les résultats du Un Chez-Soi sont probants puisqu’au niveau national par exemple plus de 80% des personnes sont toujours en logement 6 ans après (source Aurélie Tinland).

C’est curieux, un an après ma prise de poste j’ai l’impression d’avoir toujours évolué dans le médico-social. Il est vrai que je m’investie dans le domaine de la santé mentale depuis 7 ans et que j’ai beaucoup appris via l’associatif.

J’ai posé la question de la légitimité en entretien. J’accompagne des personnes polytoxicomanes…
Mais il ne faut pas oublier qu’elles souffrent de troubles psys en premier lieu. Je ne vais pas regretter de ne pas avoir consommé et ce n’est évidemment pas un “critère” à remplir pour travailler au Un Chez-Soi d’Abord. J’accorde beaucoup d’importance au travail. En France il est souvent plus identitaire qu’utilitaire. Avec ce travail de MSP j’aurais du mal à concilier davantage les deux. Mais je tiens aussi beaucoup à préserver le “reste”, ma vie de famille et ce que je fais à côté de mon emploi salarié.

Les rencontres virtuelles des 28 médiateurs pairs du Un Chez-Soi permettent d’échanger sur notre positionnement, nos pratiques, nos réussites mais aussi les difficultés rencontrées… Chaque fois je ressens le lien qui nous unit et le désir d’aider commun à tous comme les ponts qui se font entre chacun de nos parcours, uniques, respectables, admirables (si, si !!)

Un an cela se fête. J’espère que nous nous retrouverons prochainement autour d’un verre – même s’il est virtuel afin de respecter les consignes sanitaires – à l’occasion de la sortie de mon troisième ouvrage, un livre sur le thème du rétablissement et de la pair-aidance qui réunit plusieurs parcours. Par superstition je ne remercie pas encore les participants au projet mais je peux dire qu’il y a une belle équipe derrière ce livre qui – je l’espère – contribuera à mieux faire connaître et reconnaître la pair-aidance dans une logique d’accompagnement globale de la personne et selon l’approche rétablissement.

Sabrina PALUMBO-GASSNER
Coach, pair-aidante et secouriste en santé mentale, marraine des associations Solidarité Anorexie Boulimie

De la même auteure sur En Tant Que Telle
Pair-aidance et TCA
Au delà des TCA
Voyage en pair-aidance

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